LETTRE DU CABINET – NOVEMBRE 2015
Le silence vaut acceptation
La loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens consacre le principe selon lequel le silence gardé par l’administration sur une demande vaut accord.
Applicable depuis le 12 novembre 2014 aux demandes adressées aux administrations de l’État
et de ses établissements publics, le principe est applicable aux demandes adressées aux
collectivités territoriales, aux organismes de sécurité sociale et aux organismes chargés d’un
service public administratif depuis le 12 novembre 2015.
Une liste informative des procédures d’acceptation concernées est reprise sur le site
Légifrance (http://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Silence-vaut-accord-SVA)
Malgré la simplification annoncée, force est de reconnaître que le nouveau principe admet de
nombreuses exceptions prenant deux formes différentes :
- D’une part, l’ancienne règle selon laquelle le silence vaut rejet demeure applicable aux
demandes relevant des exceptions prévues par l’article 21 de la loi du 12 avril 2000 ou
aux procédures particulières fixées par plus de 40 décrets pris en application du même
article. - D’autre part, dans certains cas le délai à l’expiration duquel la décision de rejet sera
acquise sera différent du délai de deux mois (les délais dérogatoires sont également
précisés que la liste indicative des procédures reprises sur le site Légifrance).
Comme le précisait une circulaire adressée par le secrétaire général du gouvernement aux
préfets le 12 novembre 2014, (NOR : PRMX 1426634C), « si l’exception devient le principe,
les règles applicables ne sont pas bouleversées ».Ainsi, l’administration n’est pas dispensée
de l’examen particulier de chaque dossier ni d’apporter une réponse expresse aux demandes
qui lui sont adressées.
Reste donc applicable le décret n°2001-492 du 6 juin 2001 pris pour l’application du chapitre II du titre II de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et relatif à l’accusé de réception des demandes présentées aux
autorités administratives.
Tenant la relative complexité du « maquis juridique »1 institué par le choc de simplification,
certaines interrogations pratiques demeurent concernant les conséquences des éventuelles
mentions erronées que pourraient contenir les accusés réceptions précités. A ce sujet la
jurisprudence antérieure (essentiellement relative aux autorisations d’urbanisme) apporte
quelques solutions qui semblent transposables.
Ainsi, ne serait pas opposable à l’acquisition d’une décision implicite d’acceptation
l’indication que l’expiration du délai d’instruction ne vaudrait pas acceptation (CE, 25 juin
2004, SCI Maison médicale Edison, n°228437).
De même, la méconnaissance de l’obligation d’indiquer qu’il n’y a pas d’acceptation tacite à
l’expiration du délai d’instruction ne saurait avoir pour conséquence l’acquisition d’une
décision implicite d’acceptation (CE, 17 novembre 1999, Consorts Abounayan et autres, T. p.
1076).
Par ailleurs, dans l’hypothèse où l’administration a notifié une décision expresse
postérieurement à la date de naissance d’une décision implicite, cette décision expresse doit
être analysée comme une décision de retrait (CE, 30 mai 2007, SCI AGYR, n° 288519). Dans
ces conditions, conformément à l’article 23 de la loi du 12 avril 2000, les décisions implicites
d’acceptation ne pourront être retirées que pour illégalité et pendant un délai de deux mois
suivant leur naissance ou pendant toute la durée de l’instance en cas de recours contentieux.
De plus, le retrait de ces décisions implicites créatrices de droit devra être motivé et respecter
la procédure contradictoire préalable (art. 24 de la loi du 12 avril 2000).
1.M.-C. Mehl-Schouder, « Le silence vaut acceptation et les polices spéciales environnementales : une portée très atténuée », AJCT 2015, p. 135.