LETTRE DU CABINET – JANVIER 2023
Des conséquences de l’illégalité d’une demande de pièces manquantes
Avec sa décision Commune de Saint-Herblain du 9 décembre 2022 (n°454521), le Conseil d’État consacre le plein effet qu’il convient de tirer de l’illégalité d’une demande de pièces manquantes adressée au pétitionnaire par l’administration dans le cadre de l’instruction d’une demande d’autorisation d’urbanisme.
Cette décision doit conduire à la plus grande vigilance des services instructeurs puisque l’illégalité d’une demande de pièces manquantes n’est pas de nature à interrompre le délai d’instruction et ne fait plus obstacle à la naissance d’une autorisation tacite.
Tirant les conséquences de l’institution d’une liste fermée des pièces pouvant être exigées du demandeur (L. 423-1 du code de l’urbanisme tel qu’issu de la loi ELAN), le Conseil d’État précise « qu’à l’expiration du délai d’instruction tel qu’il résulte de l’application des dispositions du chapitre III du titre II du livre IV du code de l’urbanisme relatives à l’instruction des déclarations préalables, des demandes de permis de construire, d’aménager ou de démolir, naît une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite. En application de ces dispositions, le délai d’instruction n’est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n’est pas exigée en application du livre IV de la partie réglementaire du code de l’urbanisme. Dans ce cas, une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l’expiration du délai d’instruction, sans qu’une telle demande puisse y faire obstacle. ».
La question tranchée par la décision Commune de Saint-Herblain sur les effets attachés à l’irrégularité d’un des actes de la procédure d’instruction d’une demande d’autorisation d’urbanisme ne devrait pas manquer de se poser en des termes analogues s’agissant des conséquences éventuelles à tirer de l’erreur pouvant affecter l’annonce des délais d’instruction[1].
[1] Les solutions rendues par les juges du fond sur ce dernier point ne sont pas unanimes. Certaines juridictions considèrent que l’irrégularité du délai d’instruction notifié au pétitionnaire n’a pas pour effet de le rendre titulaire d’une autorisation tacite à l’issue du délai légalement applicable (CAA Bordeaux, 22 août 2019, n°17BX03638). D’autres estiment, au contraire, que l’annonce de délais d’instruction erronés ne saurait faire obstacle à la naissance d’une autorisation tacite à l’issue du délai légalement applicable (CAA Lyon, 2 juin 2021, n°19LY03389).