Lettre du cabinet – Mars 2021

Lettre du cabinet – Mars 2021

Posted by Cabinet Gil-Fourrier & Cros in Non classé 30 Mar 2021

Projet de loi Climat : l’adaptation des règles d’urbanisme au service du « zéro artificialisation nette » et de la gestion du recul du trait de côte

Suite à la convention citoyenne pour le Climat voulue par le Président de la République, le gouvernement a proposé un projet de loi « portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets », modifié en commission spéciale de l’Assemblée Nationale et actuellement débattu en séance plénière.
Ce projet de loi, jugé insuffisant pour certains ou trop contraignant pour d’autres, propose des mesures dans de nombreux domaines de la vie quotidienne : éducation, publicité, consommation, économie, transports, logement, aménagement du territoire, alimentation, agriculture et protection judiciaire de l’environnement. Par cette transversalité, il semble ainsi épouser le tryptique du développement durable (environnemental, social et économique), bien que l’exposé des motifs ne l’aborde que dans le volet éducation.
Tous ces aspects ne pouvant être évoqués en quelques lignes, la présente note se concentre sur certaines transformations envisagées concernant l’aménagement du territoire portant, d’une part, sur la lutte contre l’artificialisation des sols et l’étalement urbain, et d’autre part, sur l’adaptation des territoires littoraux au recul du trait de côte, qui s’amplifie par le changement climatique. Ces deux objectifs doivent notamment se traduire, en l’état du projet de loi tel que modifié par la commission spéciale (version du 22 mars 2021), par les évolutions suivantes :

1. La modification à marche forcée des documents d’urbanisme pour intégrer l’objectif du « zéro artificialisation nette » :
Le projet de loi entend assigner aux documents d’urbanisme un objectif de réduction du rythme d’artificialisation des sols et de réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers, sur les dix prochaines années par rapport à la décennie précédente.
Pour ce faire, les schémas de cohérence territoriale (SCOT) et les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) devront fixer des objectifs généraux de réduction du rythme d’artificialisation des sols et de réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers, par tranche de dix années.
Pour la première tranche, le rythme d’artificialisation des sols ne pourra dépasser la moitié de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers observée sur les dix dernières années précédant la promulgation de la loi.
Les SCOT, à travers le document d’orientation et d’objectifs, devront subordonner l’ouverture à l’urbanisation de nouveaux secteurs comportant des espaces naturels, agricoles ou forestiers à l’existence de besoins liés aux évolutions démographiques ou à l’accueil d’activités économiques, s’il est justifié de l’impossibilité de répondre à ces besoins dans les espaces déjà urbanisés ou les zones ouvertes à l’urbanisation ou sur des terrains déjà artificialisés (3° du II de l’article 49 de la loi). Cette règle sera également applicable aux cartes communales.
Dans cette même logique, les Plans Locaux d’urbanisme ne pourront envisager l’ouverture à l’urbanisation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers, que s’il est justifié que la capacité d’aménager et de construire est déjà mobilisée dans les espaces urbanisés. Les règlements des plans pourront par ailleurs « définir des règles de limitation de l’imperméabilisation des sols, de désimperméabilisation des sols et de compensation de toute nouvelle imperméabilisation. ».
Afin d’assurer l’intégration des objectifs généraux de réduction du rythme d’artificialisation des sols et de réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers, un calendrier particulièrement contraint est envisagé pour garantir l’adaptation effective de l’ensemble des documents d’aménagement et d’urbanisme. A défaut de respecter le calendrier fixé par la loi, aucune autorisation d’urbanisme ne pourra être délivrée dans une zone à urbaniser des PLU.
.
2. Sur les mesures visant à adapter les territoires littoraux au recul du trait de côte
Le projet de loi Climat, largement enrichi par la commission spéciale, prévoit plusieurs mesures visant à doter les collectivités territoriales d’outils qui doivent permettre l’adaptation des territoires littoraux aux enjeux liés au recul du trait de côte.
Il est ainsi prévu l’établissement par décret d’une liste de communes littorales concernées par le recul du trait de côte et qui devront porter la bande littorale inconstructible mentionnée à l’article L. 121-16 à plus de cent mètres ou encore délimiter dans le document graphique de leurs PLU les zones exposées au recul du trait de côte à l’horizon de 30 ans et à un horizon compris entre 30 et 100 ans.
Dans les zones exposées au recul du trait de côte à l’horizon de 30 ans les possibilités de construire seraient limitées aux travaux de réfection et d’adaptation des constructions existantes et à l’extension des constructions existantes.
Dans les zones exposées au recul du trait de côte à un horizon compris entre 30 et 100 ans, la délivrance des autorisations seraient conditionnées à la consignation entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations d’une somme, correspondant au coût prévisionnel de la démolition et de la remise en état, devant être mise en œuvre lorsque le recul du trait de côte est tel que la sécurité des personnes ne pourrait plus être assurée au-delà d’une durée de 3 ans.
Le projet prévoit aussi la création d’un droit de préemption institué au profit des communes et EPCI afin de prévenir les conséquences du recul du trait de côte sur les biens situés dans les zones exposées au recul du trait de côte et dans le but de procéder à leur renaturation ou d’y consentir des autorisations d’occupation temporaires compatible à l’évolution prévisible du trait de côte.
Ces mesures seront complétées par le Gouvernement par voie d’ordonnance, qui sera aussi chargé de créer un nouveau régime de contrat de bail réel immobilier de longue durée, par lequel un bailleur consent à un preneur des droits réels, en contrepartie d’une redevance foncière, en vue d’occuper ou de louer, d’exploiter, d’aménager, de construire ou de réhabiliter des installations, ouvrages et bâtiments situés dans des zones exposées au recul du trait de côte ou à des risques naturels aggravés par le changement climatique.