LETTRE DU CABINET – MARS 2024
Expropriation
Absence d’indemnisation d’une construction irrégulière sur une parcelle inconstructible
Par principe, en matière d’expropriation, seul peut être indemnisé le préjudice reposant sur un droit juridiquement protégé au jour de l’expropriation (3e Civ., 3 décembre 1975, pourvoi n° 75-70.061).
La question, divisant les juridictions du fond, était de savoir si la dépossession d’une construction édifiée irrégulièrement, et contre laquelle aucune action en démolition n’était envisageable, ouvrait droit à indemnisation.
Par un arrêt du 15 février 2024, la Cour de cassation affirme que la dépossession par expropriation d’une construction édifiée irrégulièrement et située sur une parcelle inconstructible n’ouvre pas droit à indemnisation faute pour le propriétaire de pouvoir invoquer un droit juridiquement protégé au jour de l’expropriation (Civ. 3e, 15/02/2024, FS-B, n°22-16.460).
En l’espèce, la Cour a considéré que l’exproprié ne pouvait pas invoquer un droit juridiquement protégé dont la perte pourrait ouvrir droit à indemnisation, même si la prescription pénale ou civile était acquise, dès lors qu’il s’agissait d’une construction irrégulière ne justifiant pas d’une existence légale.
L’indemnité est alors fixée par référence à la valeur du terrain nu.
Cette position de la Cour est nouvelle et la question de la prescription de l’action en démolition apparaît ici secondaire.
En définitive, l’absence de droit à indemnisation et l’absence de droit juridiquement protégé reposent sur deux conditions :
- L’irrégularité de la construction ;
- Le caractère inconstructible du terrain.
La Cour de cassation laisse donc ouverte la question de l’indemnisation d’une construction illégale qui serait cependant régularisable.