Lettre du cabinet – Septembre 2021
Les périmètres de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains
L’adoption de la loi dite Climat et résilience (1) et la consécration de l’objectif d’absence d’artificialisation nette des sols en 2050 (2) invitent à s’interroger sur l’utilité des Périmètres de protection et de mise en valeur des espaces Agricoles Et Naturels périurbains (PAEN) en tant qu’outils pouvant efficacement participer à la maîtrise de la pression foncière exercée sur ces espaces aussi convoités que sensibles.
Après avoir brièvement évoqué l’objet et le régime des PAEN, le cabinet fait témoigner l’un de ses partenaires, Jean-Marie PETIAU d’ECOSYS, ayant réalisé le 1er PAEN pour le Département des Pyrénées Orientales et en passe de finaliser le 1er PAEN ultra-marin pour le Département de la Réunion sur la Commune de Petite Ile.
Issus de la loi n°2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, les PEAN sont institués à l’initiative des départements ou des établissements publics compétents en matière de SCoT, avec l’accord des communes concernées et après avis de la chambre départementale d’agriculture.
La détermination du périmètre s’accompagne d’un programme d’action devant permettre la mise en œuvre d’une politique favorisant l’exploitation agricole, la gestion forestière, la préservation et la valorisation des espaces naturels et des paysages au sein d’un périmètre d’intervention déterminé (3).
Le premier atout du PAEN sera de permettre l’acquisition des biens, bâtis et non bâtis, situés dans le périmètre à l’amiable, par expropriation ou par préemption (4) pour la réalisation des objectifs définis par le programme d’action (5).
Le PAEN ne peut inclure des terrains situés en zone urbaine ou à urbaniser délimitée par un plan local d’urbanisme ou des terrains situés dans un secteur constructible délimité par une carte communale. Les caractéristiques des terrains et leur classement au titre d’un document d’urbanisme sont déterminants dans la mesure où leur utilisation effective est sans incidence sur la possibilité de les intégrer au périmètre de protection (6).
Le second atout du PAEN sera de soustraire durablement les terrains compris dans le périmètre des possibilités de classement en zone urbaine ou à urbaniser des PLU ou des secteurs constructibles des cartes communales puisque toute modification du périmètre ayant pour effet d’en retirer un ou plusieurs terrains ne peut intervenir que par décret (7).
Bien qu’ils demeurent rares (8), tenant le caractère nécessairement consensuel de son élaboration, le PAEN constitue un outil pertinent pour atteindre l’objectif d’équilibre assigné à l’action des collectivités publiques en matière d’urbanisme.
Le mot de Jean-Marie PETIAU d’ECOSYS
Les PAEN, côté vécu
L’élaboration d’un PAEN est d’abord une affaire de limite entre les espaces urbains et les espaces agricoles ou naturels.
La limite, qui ne doit en rien être une barrière, est au contraire le support d’un nouveau dialogue respectueux entre les différentes espaces et les acteurs.
La réflexion pour la création d’un PAEN proposera des idées concrètes, adaptées et opérationnelles à la gestion des transitions, des lisières agricoles, participant à ce dialogue qui est l’enjeu principal de cet outil.
Si la concertation est l’atout principal pour la faisabilité d’un PAEN, sa protection est maximale et l’effet constaté dès la création du PAEN est immédiat sur la spéculation foncière avec un retour au prix du marché agricole des terres et de l’immobilier dans le périmètre. Cet effet offre de nouvelles perspectives à l’installation ou l’agrandissement des exploitations agricoles.
Les effets de la loi Climat et résilience sur les PAEN ?
La création et la mise en œuvre des PAEN se sont accélérées depuis la Loi ALUR du 24 mars 2014 incitant le basculement d’un urbanisme d’extension à un urbanisme de densification, favorisant ainsi l’accord indispensable des communes.
Qu’en sera-t-il avec la loi Climat et résilience ?
Plusieurs hypothèses restent envisageables :
– La maitrise encore plus drastique d’un urbanisme d’extension qui sera suffisante pour protéger les espaces agricoles et naturels rendant la création de PAEN moins utile
– A l’inverse, une accélération de leur instauration du fait que les communes pourront encore plus difficilement planifier des extensions d’urbanisation ?
– Ou entre les deux, une complémentarité renforcée entre PLU ou carte communale et PAEN avec une planification des interstices laissés entre les zones U et AU d’une part et PAEN d’autre part ?
Le programme d’action, qui accompagne obligatoirement un PAEN, restera en tout état de cause un élément clé de par l’opportunité qu’il offre de concentration des moyens sur un périmètre protégé et la dynamique qu’il crée, en particulier, pour une restauration de l’image de l’agriculture aux portes de l’urbain.
(1) LOI n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
(2) Art. 192 et s. de la loi précitée.
(3) Art. L.113-21 C. Urb.
(4) Art. L.113-24 et L.113-25 C. Urb. L.113-27 C. Urb.
(5) L.113-27 C. Urb.
(6) CAA Marseille, 27 février 2018, n° 17MA00357 – Légalité du périmètre incluant un terrain exploité sous la forme d’un camping dès lors qu’il n’est ni dans une zone urbaine, ni dans une zone à urbaniser.
(7) L.113-19 C. Urb.
(8) 23 PEAN signés et 14 en projet selon un rapport n°17076 du CGAAER en date de mars 2018.